Le Télétravail : Le Guide Complet — Chapitre II

Nicolas Hermet - 2020-03-25
Photo by Chinh Le Duc on Unsplash
Les notifications ça devient n’importe quoi depuis quelques jours, vous êtes noyés sous les coups de fil, vous passez votre vie en visio, les mails s’entassent par liasses de 100. Si vous vous reconnaissez dans cette liste, alors cet article est complètement pour vous.



La série d’articles :




Après le constat, le changement.


Une fois que vous avez vraiment pris le temps d’observer ce qui n’allait pas dans la manière de fonctionner avant le COVID-19. Alors vous êtes prêt pour vous organiser pour le télétravail.

Les moyens de communications

Quand t’arrives pas à régler ton micro pendant ta première visio.

En fait, si vous êtes en galère de communication dans votre télétravail tout récent, c’est probablement que vous ne faites pas le lien entre l’information, sa fréquence de réception, ni la rapidité avec laquelle vous devez répondre.

Un petit rappel :
  • Un mail : on peut y répondre qu’au bout de quelques jours… si vous êtes l’émetteur et n’avez pas de réponse avant c’est normal. Mais donc : rien ne sert d’avoir la notification en temps réel.
  • Le téléphone : ça ne se décroche pas systématiquement, ce n’est pas une obligation, surtout si vous êtes concentré sur quelque chose d’important.
  • Les messageries instantanées : ça se déconnecte.
  • La visio : c’est sûrement nouveau pour vous, peut-être pas. En tout cas il y a certains codes à respecter.

En réalité chaque canal de communication vient avec une signification bien précise. Le problème c’est que, si ces significations sont pourtant valables même dans la vie “normale”, lorsque vous ne les respectez pas, vous n’avez pas la sensation d’une mauvaise communication. Juste parce que vous compensez avec la proximité de vos collègues. Mais ces significations existent bel et bien :
  • On téléphone : **c’est que c’est urgent**. C’est sensé être l’ultime recourt quand on est dans la merde et qu’on est bloqué si on n’obtient pas la réponse. Mais à chaque coup de fil que vous avez besoin de passer vous dérangez forcément la personne qui décroche. Vous allez lui pomper son temps de cerveau c’est inévitable.
  • Un mail : **c’est important, mais non urgent**. C’est pour une info descendante qui ne nécessite pas de réponse. Hormis un remerciement éventuellement. Maximum un ou deux retours souhaités si c’est pour organiser un rendez-vous. Idem avant de cliquer sur le bouton ‘envoyer’ demandez-vous si c’est vraiment important que le destinataire reçoive ça. L’avantage c’est que votre destinataire pourra choisir à quel moment utiliser son temps de cerveau pour vous lire, et pour vous répondre. Vous ne le dérangez que quand votre interlocuteur l’aura sciemment décidé.
  • Une messagerie instantanée : **c’est ni important, ni urgent**. C’est pour des échanges rapides. On aurait pu se débrouiller autrement et seul… Mais ce sera plus rapide de déranger un collègue. En 5–10 minutes on doit pouvoir obtenir la réponse. Si vous y répondez : c’est que vous êtes prêt à aller jusqu’au bout de la discussion et pas de vous barrer en plein milieu (véridique, je l’ai vu faire tellement de fois : 
    X — “Hey vous êtes au courant des nouvelles directives ?”. 
    Y — “ Nan de quoi ça parle ?”. 
    X — [ne donne pas de réponse] 
    Insupportable non ?).
  • Visio : **c’est important, vraiment important** ça va remplacer vos réunions. Cela ne doit servir qu’à pouvoir prendre des décisions. Il doit en ressortir une décision ! Sinon ce n’est pas une réunion, mais un workshop, et c’est différent. C’est un peu trop tôt pour aborder le sujet mais on pourra le faire si vous me le demandez en commentaire. Bref, en visio, le temps des gens qui participent est précieux. Utilisez le à bon escient.



Exercice :
  • A chaque coup de téléphone passé, prenez 5 minutes pour réfléchir à comment vous auriez pu faire pour ne pas vous retrouver dans cette situation d’urgence. Il y a bien quelque chose qui aurait pu être anticipé. Toujours.
  • À chaque mail de votre boîte qui se transforme en fil de discussion avec Clarence ou Régis qui font “répondre à tous” : prenez 5 minutes pour déceler ce qui n’a pas été suffisamment réfléchit ou concerté en amont. Pourquoi y-a-t-il eu besoin de cette discussion si longue ?
  • A chaque discussion instantanée : demandez-vous s’il n’y a pas moyen de centraliser l’info manquante avec les outils déjà existants. L’idée est de solliciter les collègues uniquement pour aller plus vite. Donc si l’info est centralisée et son accès aussi rapide que de demander à un collègue, cela fera moins d’interruptions de concentration.
  • À chaque réunion par visio : demandez-vous si une décision a bien été prise ? Si ce n’est pas le cas, c’est que les participants n’avaient pas assez d’informations au préalable et donc comment faire pour qu’ils les aient à l’avenir ?

À vous de jouer



Organiser son temps de travail


Je prendrais soin de m’attarder un peu plus sur les bonnes pratiques de ces outils de communications. Mais plus tard, dans un article dédié exclusivement aux outils, et si vous en ressentez le besoin bien sûr.

Mais pour le moment si vous respectez ces quelques consignes et exercices, vous êtes paré à passer un bien meilleur moment.

Ne reste plus qu’à organiser tout ça.

Nan mais c’est bon j’ai 30 ans de métier j’ai pas besoin qu’on me dise comment je m’organise.

Moi je pense que si. Parce que je sais très bien ce qui vous arrive en ce moment (merci à ma chérie et mes potes, pour qui c’est nouveau, de m’en avoir parlé). Les diverses sonneries sont incessantes ! Notification, téléphones, mails, en fait vous passez votre vie à décrocher de vos tâches importantes ou urgentes, pour voir de quoi relèvent ces notifications. Au début, quand j’observais ma femme travailler j’ai halluciné : ça n’arrêtait pas ! Et ce n’était pas vraiment habituel.

Tout ça, simplement parce qu’avant : on pouvait compter sur les collègues d’à côté pour nous raconter ce qu’on avait manqué. Comme ce n’est plus le cas : la peur de rater quelque chose d’essentiel devient viscérale. Et c’est l’engrenage d’émotion négative, de culpabilité, de sensation d’inefficacité, [insérez ici votre émotion pas glop du moment].

En fait la clef pour faire son télétravail correctement c’est d‘organiser…. Ses notifications.

Alors, et seulement à cette condition, vous pourrez constater que le télétravail, qui empêche d’être dérangé inutilement par les collègues, est souvent plus efficace que le travail classique !!

Astuce déjà vu mille fois sur les réseaux sociaux : Ménagez-vous des plages horaires de concentration
. Généralement des créneaux de 1 à 2h (jusqu’à 4h si besoin) par jour. Vous avez déjà dû lire ça quelque part. Mais maintenant vous comprenez mieux pourquoi c’est si important.

Pendant ces créneaux : vous coupez votre téléphone
, vos notification du bureau, et par pitié : fermez-moi ce client de messagerie ou e-mail ! Personne ne prendra feu, et si vous faites un travail de bureau et n’êtes pas au support client, vous n’avez très probablement pas besoin d’être joignable à la minute. Donc : NE SOYEZ PAS JOIGNABLE A LA MINUTE quand vous avez besoin d’être concentré.

En échange, ménagez-vous une plage horaire où vous êtes joignable à la seconde, et où vous répondez aux notifications diverses. Il faut que vos collègues puissent vous solliciter en cas de besoin de leurs parts (ils ne sont peut-être pas aussi organisés que vous maintenant 😉).

Idéalement prenez une heure dans la journée pour regarder vos mails. En vrai ? Juste une heure suffit. Et croyez-moi vous n’avez pas besoin de lire les 400 mails que vous recevez. D’ailleurs si tout le monde respecte le paragraphe précédent, normalement il n’y aura pas 400 mails par jour.

Acceptez que probablement 90% des e-mails que vous recevez ne servent qu’à stocker l’information “Au cas où”… Et c’est tout…

En fait cela signifie, qu’un espace de stockage partagé et administré serait plus efficace… Mais on y reviendra également quand j’aborderais les outils.

Mais si c’est le cas, on se créé vite sa petite règle Outlook ou Gmail (ou autre). Prenez 1h ou 2h de votre temps de travail pour le faire. Si cela vous économise plusieurs heures par semaine de lecture de mails inutiles, votre manager vous en remerciera.

Si vous souhaitez aller encore plus loin dans cette démarche, je vous recommande la lecture de La semaine de 4 heures de Timothy Ferriss.


Avis aux managers : vous avez bien lu ce que je viens d’écrire ? Par pitié : n’exigez pas de vos équipes d’être disponible en temps réel, de prouver qu’ils sont au travail en étant connecté à Skype en permanence où de les forcer à venir au bureau malgré le confinement juste parce que “tu comprends, t’es jeune, c’est difficile de te faire confiance”. (Véridique… Je ne citerais pas de nom mais j’ai failli vomir). J’aborderais la confiance dans un prochain article car ça me tient à cœur. Mais je sais aussi combien c’est dur pour vous. J’ai aussi des choses à vous dire pour vous aider. Beaucoup même. C’est pour ça que je ferai un ou plusieurs articles dédiés un peu plus tard. En attendant : confiez-moi vos problématiques je pourrais y répondre en live si besoin 😉



Acceptez de ne pas y arriver.

Parce que des fois… Rien ne marche


Ouais… Vous vous souvenez quand je vous avais parlé de l’honnêteté comme premier conseil de télétravail ? Ben on y est : vous n’allez pas réussir du premier coup. Mais croyez-moi : tout le monde s’en fout, car c’est pareil pour tout le monde, tout le monde galère au début. Si tout le monde est honnête là-dessus, alors tout le monde peut profiter de l’expérience des autres.

Pour organiser vos notifications, le mieux est d’essayer quelque chose, tenez-vous y pendant 1 semaine, et faites le point en fin de journée. Si quelque chose ne vous va pas : changez-le… Et recommencez.

Moi cela fait maintenant un moment que je pratique le télétravail, et il m’arrive encore d’ajuster certaines choses qui ne me vont pas. Sauf que moi j’ai pu expérimenter progressivement. Alors j’imagine la galère pour vous qui plongez dedans brutalement. Donc clairement il n’y a pas de honte à s’y reprendre à plusieurs fois, tester des choses etc… En revanche il faut vraiment accepter de prendre le temps de réfléchir à cette organisation. Ce ne sera jamais du temps perdu



Il faut bien commencer quelque part


Je vous livre mon emplois du temps. Vous pouvez partir là-dessus, l’ajuster en fonction de vos besoins pro et de vos habitudes précédentes (moi je suis développeur web, donc forcément tout le monde ne sera pas dans le même cas), et le suivre pendant la semaine glissante qui arrive. Puis réajustez… Chaque fois qu’un truc ne vous va pas.
  • 🕣 🔕8h30 : je commence en général ma journée = Tout est coupé, même le téléphone, au moins jusqu’à 10h30 minimum.
  • 🕚 🔔11h : je rallume tout. Je consulte attentivement mes mails et JE LES TRIE DIRECT (genre 90% partent à la benne, et je vide la corbeille dans la foulée pour ne pas être tenté) et je fais le tour des différentes notifications. Jusqu’à présent, en faisant ça, personne n’est mort pendant un de mes silences radio, aucun collègue n’a été bloqué, et je n’ai jamais bossé pour rien, et je n’ai jamais raté de mail ultra-important de la mort. Mais oui je sais : ça fait peur.
  • 🕛 🔔12h00 : On fait le point entre collègues de la même équipe. On a un système d’audio conférence, où tout le monde appelle le même numéro et on se retrouve jusqu’à à 5 ou 6 sur la même ligne. Chacun à tour de rôle dit : ce qu’il a fait depuis la veille, ce qu’il compte faire jusqu’au lendemain, s’il a des points bloquants pour faire son travail. Le cas échéant ça peut mener à organiser des réunions en visio pour l’aprèm.
  • 🍕12h15 : déjeuner sans boulot. Interdiction d’avoir la moindre interaction avec quoique ce soit du boulot ! Sinon ce n’est pas une pause, et vous risquez de saturer.
  • 🕜☎️13h15–13h45 (selon votre pause déjeuner) : tâches inintelligentes ou répétitives, réunions, visios etc… Je suis en général un peu moins concentré mais plus réactif donc je réactive toutes les notifs que j’avais coupées pendant le déjeuner. De toutes façons c’est rarement avant 16h que j’arrive à retrouver une concentration parfaite… Donc autant se servir de ce créneau pour de l’échange avec les autres, ou des réflexions à plus long terme. Voir de la veille quand vraiment je suis crevé.
  • 🕓 🔕 / 🔔 16h — 18h : C’est variable comme horaire mais en général j’ai un regain d’énergie/motivation/concentration donc je peux me remettre sur des choses plus délicates. Forcément si c’est le cas je recoupe les notifs instantanées, mais garde les mails et le téléphone, simplement car je sais que ce n’est pas le cas de mes collègues.

Peu importe si vous faites exactement pareil ou pas… Mais une chose est importante :

Cet emplois du temps : mes collègues le connaissent. Ils ont également le leur, et je les connais.

Honnêteté
(vous vous souvenez ?) : je suis transparent envers mes collègues quant à ce planning, et surtout en cas de changement.

Discipline
: je m’y tiens, sinon ça devient relou pour mes collègues qui ne sauront jamais quand ils peuvent m’appeler. Et ce sera relou pour moi aussi (l’organisation du reste devient compliquée), et surtout ça deviendra l’anarchie, et l’explosion de procrastination.

Respect
: je respecte scrupuleusement le rythme de mes collègues.

C’est tout pour aujourd’hui.


J’espère que cela vous a aidé. Dites-le moi en commentaires, ou sur Twitter / LinkedIn. N’hésitez pas à partager votre organisation et votre métier afin que tout le monde puisse s’en inspirer, et aussi parce que je suis curieux du vôtre !

J’ai abordé pas mal de points qui requièrent de la discipline aujourd’hui. Je pense que le prochain article repartira de cette routine qu’on vient de mettre en place, qui pour le moment est propre en tout un chacun.

Et j’en profiterai pour aborder le côté manager de la chose, développer l’aspect organisation entre collègues, qui possède quelques aspects subtils.

On verra aussi comment organiser ce qui nous manque le plus : la machine à café, et les réunions de couloir.

Ou je pourrais aborder autre chose en fonction de vos commentaires et réactions à cet article.

Bref… À bientôt 😉